Qui es-tu ?
Gaëlle Choisne, de père breton et de mère haïtienne, je suis les opposés, la contradiction.
Es-tu humaine ?
Non.
Crois-tu en l’intuition ?
Je ne travaille qu’avec elle. Une forme de résistance à un monde trop rationnel.
Gaëlle Choisne, Gloire à la rétention coloniale, vidéo super 8 numérisée, 4/3, 00’04’21, 2015. © Courtesy de l’artiste.
Es-tu une optimiste ?
L’optimiste n’appartient qu’aux personnes qui ont été pessimistes un jour.
Comment décrirais-tu le futur ?
Regarder derrière notre épaule et avoir la capacité de voir le paysage qui est devant nous.
Gaëlle Choisne, N.E.V.E.Q.N.A.L.A. (Nous étions les victimes alors que nous avions été les auteurs), installation, verre, métal, plâtre, céramique, silicone, stylo bic, chaines dorées, tatouages et matériaux mixtes, vidéo 16/9, 00’08’35, numérique, couleur, 2016. © Courtesy de l’artiste & Galerie UNTILTHEN.
Magie et technologie s’opposent-elles ?
La technologie est très utile pour la magie.
Quelle(s) différence(s) entre rêves, désirs et projections ?
Il n’y a pas de différence, le dénominateur commun est l’amour. C’est ce qui se passe
lorsque l’on fait de l’art c’est un élan d’amour et d’intuition.
Détail « L’oiseau-nègre », N.E.V.E.Q.N.A.L.A. (Nous étions les victimes alors que nous avions été les auteurs), installation, verre, métal, plâtre, céramique, silicone, stylo bic, chaines dorées, tatouages et matériaux mixtes, vidéo 16/9, 00’08’35, numérique, couleur, 2016. © Courtesy de l’artiste & Galerie UNTILTHEN.
Que signifie le mot « fantasme » ?
Le fantasme est un palliatif à l’action, à la mémoire et à l’angoisse. Un processus pour combler un espace inconnu, étranger.
Te sens-tu étrangère ? Si oui, à quoi ?
A l’univers ? j’en suis une des composantes comme chacun d’entre nous si on le veut bien.
Gaëlle Choisne, Stèles (Port-au-prince, Haiti), 39,7×125 cm, béton gros sel, impression, 2013-2014. © Courtesy de l’artiste & Galerie UNTILTHEN.
Que signifie « blackness » ? / Et « afro-ness » ?
« We are all Negroes ». La mondialisation nous a tous absorbés, esclaves de l’uniformisation. La mondialité nous attends.
Vue de l’exposition « Pop Up » , Tour Panorama (Friche Belle de Mai), Marseille, Avril – Juillet 2014. Gaëlle Choisne, Cric Crac (Ensemble), plâtre, métal, béton, cire, feuille de palmier, bouteille de Barbancourt, production Astérides. © Courtesy de JCLett.
Qu’est-ce que l’Afrique ?
Un fantasme occidental pour les uns, l’origine du monde pour les autres, L’Afrique est devenu un concept. Un état d’être et de penser.
A-t-elle quoi que ce soit à apprendre au/du monde ?
Laissons-la parler!
Gaëlle Choisne, Quand je serais morte, capture d’écran de vidéo super 8, couleur, 00’02’56, 4/3, plaque d’aluminium, 2016. © Courtesy de l’artiste & Galerie UNTILTHEN.
Quel est son futur ?
La renaissance.
Qu’est-ce que l’ afrofuturisme ?
Mysticisme, imagination, technologie, Libération, Black cultures mais j’aimerais modifier cela en mixed cultures.
Gaëlle Choisne, Conquête et carnaval, cire gros sel pigments, polystyrène, 2015. © Courtesy Frédéric Jaulmens, Montpellier Agglomération.
Es-tu une afrofuturiste ?
Je n’aime pas être mise dans des cases mais j’aime pas mal l’idée.
Quelle est la dernière chose que tu aies apprise ?
C’est de désapprendre sans cesse.
Vue de Rendez-Vous / Biennale de Lyon, IAC, 2015. Gaëlle Choisne, La survivance du goût, dimensions variables, cire, gros sel, plomb, métal, plâtre, verre, pigments, bois, 2015. © Courtesy de l’artiste & Emile Ouroumov.
Où étais-tu vendredi 20 avril 2063 ?
Je discutais avec Pier Paolo Pasolini de son film Carnet de notes pour une Orestie africaine.
Une bande son ?
Décris-nous la fin du monde.
Les mers fusionneront avec la lave des volcans.
Et si tu devais recommencer ?
A zéro ? Trop de boulot… Non, non, je continue.
Gaëlle Choisne, Crocodile hunters, 112 x 84 cm, installation, projection vidéo sur sculpture et «végétation camouflage». Video found footage d’un film super 8 Crocodile Hunters, 6’44’00, 16 / 9, cire, sel, végétation artificielle, 2013. © Courtesy de l’artiste.
Un dernier commentaire ?
« Afrique j’ai gardé ta mémoire Afrique
tu es en moi
Comme l’écharde dans la blessure
comme un fétiche tutélaire au centre du village
fais de moi la pierre de ta fronde
de ma bouche les lèvres de ta plaie
de mes genoux les colonnes brisées de ton abaissement…
POURTANT
je ne veux être que de votre race
ouvriers paysans de tous les pays
ce qui nous sépare
les climats l’étendue l’espace
les mers
un peu de mousse de voiliers dans un baquet d’indigo
une lessive de nuages séchant sur l’horizon
ici des chaumes un impur marigot
là des steppes tondues aux ciseaux du gel
des alpages
la rêverie d’une prairie bercée de peupliers
le collier d’une rivière à la gorge d’une colline
le pouls des fabriques martelant la fièvre des étés
d’autres plages d’autres jungles
l’assemblée des montagnes
habitée de la haute pensée des éperviers
d’autres villages
Est-ce tout cela climat étendue espace
qui crée le clan la tribu la nation
la peau la race et les dieux
notre dissemblance inexorable ? »
Jacques Roumain, extrait de Bois d’Ebène, Prélude, 1945.
Gaëlle Choisne, Peau de chagrin, 2m3 de superficie, silicone, transfert photographie couleur, chaînes contre-plaqué or, 2016. © Courtesy de l’artiste & Galerie UNTILTHEN.