Philippi Music Project

D’un côté, nous avons les bidonvilles, ces quartiers hyper paupérisés d’Afrique, d’Amérique Latine et d’ailleurs, qui regorgent certes de criminalité et d’addictions – entre autres fléaux… – mais aussi d’inventivité et de débrouillardise, de talents bruts et alternatifs, et dont la volonté et l’enthousiasme forcent l’admiration. De l’autre, il y a le Cap : une ville-lumière hyperactive, foisonnante et admirable en de nombreux points et dont l’attractivité n’est désormais plus à prouver. Le souci – et on le connait trop bien – c’est que cette métropole sud-africaine, comme toute métropole qui se respecte, a forgé sa superbe sur les bases de l’exclusion et du déni de ses populations les plus en difficulté, et des cicatrices de 43 ans d’apartheid, aboli en 1991…

 

Mais il ne s’agit ici pas de vous faire un cours sur les revers de la gloire capitaliste ou d’insister sur les tribulations quotidiennes de la vie des townships. Nous ce qui nous intéresse c’est cette initiative, Philippi Music Project, qui n’est pas porteuse d’espoirs diaphanes ou de paillettes mais propose des solutions concrètes aux habitants du quartier éponyme et des environs.

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Tout commence en juillet 2014 avec Sibusiso Nyamakazi, alors 23 ans, écrivain, MC et musicien. Charismatique en diable et impliqué dans différents programmes de développement de la communauté où il a grandi, Philippi (via le réseau Inyanda Youth Network notamment), il fait la rencontre d’étudiants en Innovation sociale de l’Université du Cap dont un jeune français, Baptiste Guillemet, catapulté dans les environs par un mélange de karma et de curiosité bienveillante. Très vite copains, ils passent partenaires parce que eux aussi font le constat d’une urgence à changer les choses, ici et maintenant, avec les moyens du bord plutôt que d’attendre que les solutions ne nous arrivent toutes cuites et dans un beau packaging.

 

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Leur idée est simple : trouver une manière de réduire l’écart entre le Cap et ses townships. La musique leur semble alors un point d’entrée naturel, comme pratique cathartique et d’empowerment : elle est un matériau social propice aux échanges et vecteur de transmission ! Ils lancent alors un premier concours, devant offrir l’opportunité à ces chanteurs et musiciens défavorisés d’être embarqués dans la production professionnelle d’une compilation, en travaillant avec des acteurs de l’industrie (producteurs, média, studio) à créer, marketer et vendre un produit musical.

 

En 1 mois, ils récoltent plus de 150 candidatures venues de Philippi et des alentours. Mais très vite aussi il réalisent que proposer aux jeunes de venir enregistrer au Cap est une chose… mais comment faire quand la moitié d’entre eux n’ont déjà pas les moyens techniques et financiers d’enregistrer la maquette de candidature ? Peu farouches, Sbu et Bap, comme ils s’appellent, décident alors de rendre visites à ces artistes locaux et de faire le taff eux-même, cahin-caha ; le premier étant précédé de son aura d’activiste engagé et d’enfant du quartier, le second équipé de son ordi, son micro et sa carte son.

 

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Le projet est un beau succès et le jury composé de producteurs et artistes reconnus de l’industrie, membres de maisons de disques comme Black Mango Music ou encore d’organisations actives sur les scènes électroniques comme RedBull ou Bridges for Music, sélectionne 10 artistes hip-hop, house ou même gospel pour en faire une compile. Mais l’effervescence retombée, la situation de départ n’a pas franchement évolué et nos deux compères commencent à penser à la phase 2.

 

Philippi Project, c’est un container de 12m de long équipé d’un studio d’enregistrement professionnel. Mais parce que de manière très lucide, il s’agit de travailler à partir de la réalité du bidonville, c’est aussi un réseau d’acteurs associés comme Britecap (une app sud-africaine aidant à la recherche d’emploi), Playing for Change (un réseau d’écoles de musique) ou encore la SAE Institute (une école privée de musique, audiovisuel et design qui propose un programme de bourses pour des formations plus poussées).

 

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Autour de cela, c’est encore de la création d’événements, des concerts, des ateliers et du mentorat mis à disposition gratuitement aux musiciens utilisateurs du studio. Le Philippi Music Project se finance par les services de studio d’enregistrement, mastering et mixing. La distribution et les évènements génèrent également des revenus partagés avec les artistes. Car il ne s’agit pas de perpétuer une dramaturgie relationnelle du don, mais d’amorcer une économie sociale et solidaire, pérenne, à partir du township et à destination du township.

 

Aujourd’hui, ils ont besoin de nous : toi + toi + toi… + moi. Pourquoi ? Aider à la construction du studio, ni plus, ni moins. Comment ? En contribuant à leur campagne de crowdfunding sur Indiegogo jusqu’au 23 juin minuit. Comment (bis) ? En diffusant l’info pour que d’autres personnes soutiennent elles aussi le projet !

 

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Soutenez-les ♥ :

indiegogo.com/projects/philippi-music-project

Et découvrez en plus sur le projet :

via leur site :

philippimusicproject.strikingly.com

ou sur

facebook + soundcloud + twitter

Par Mawena Yehouessi

Diplomée de Philosophie puis Gestion de Projets Culturels, Mawena fait ses premières armes dans les milieux de l’art contemporain tout en menant de front divers projets : soirées, édition, collectifs artistiques… Fondatrice et directrice de Black(s) to the Future, son objectif est simple : mettre en lumière la part « afro » du monde et performer le futur. | www.mawenayehouessi.fr // @ma.wena

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